samedi 26 décembre 2015

D'un Noël à un autre... D'un cœur à un autre...

27 ans... oui, il y a 27 ans que j'ai rencontré le Liban. Je parle de rencontre comme on parle d'une personne. Car il s'agit là d'une "personne" aux milliers de visages... mais qui n'a pas sa face publique, sa face intime, son côté aimable et son côté plus sombre ?

25 décembre 1988, j'étais au cœur de la désolation, au cœur de Beyrouth, place des Martyrs...au milieu des décombres de ce centre ville, symbole d'une division tracée à l'encre verte de la végétation alors indomptée. La ligne verte... ainsi était-elle appelée cette coulée de la honte non pas pour la couleur de l'espoir, mais pour la vision aérienne qu'elle offrait.


C'est là, que ce 25 décembre que je n'oublierai jamais, mes camarades et moi, inconscients du véritable danger, évoluant comme dans un décor de cinéma, avons marché sans un mot, sans un bruit (pour ne pas devenir les cibles des frères ennemis d'en face), dans les carcasses d'immeubles grêlés d'impacts et dégoulinant de la pluie qui tombait drue ce jour-là. Le ciel bas pleurait... et je suivais l'exemple. Et pourtant ! Combien d'enfants et de plus grands n'avions-nous déjà vus, un si large sourire aux lèvres et aux yeux (très important le sourire des yeux), nous accueillir, nous applaudir, nous embrasser ? Pas de triste mine, ni plainte, de l'émotion en veux-tu en voilà, çà oui ! Chacune de ces mains tendues ne l'était pas en quête d'un don quelconque, mais en remerciements, en gratitude, en partage du peu que certains possédaient encore. 

De ces mains, de ces regards, de ces rires et même de ces larmes montait une telle énergie que je me suis sentie enveloppée, embrassée jusqu'à l'embrasement. Un feu qui brûle encore jusqu'à présent, mais ne consume pas.

27 ans plus tard... le centre ville a fait peau neuve depuis déjà un bon moment. J'ai même été témoin direct de sa démolition avec de nombreuses surprises archéologiques découvertes à chaque coup de pelleteuse ou presque. C'est un cœur de ville flambant neuf que nous avons là messieurs-dames ! Un cœur qui brille certes mais un cœur de pierre tout de même... Celui qui m'a tant touchée, qui a provoqué mes vrais profonds émois n'est plus. Il a été rasé de près, mais il bat encore. Oui ! Je le sens et entends toujours ses battements vibrer en celles et ceux qui ont su garder vivante cette flamme, cet espoir, cette simplicité née d'un nécessaire retour à l'essentiel. Au milieu de cette course à tout ce qui brille, sous cette épaisse couche de superficialité, il y a encore des mains tendues remplies de générosité et des regards qui sourient vraiment. 
D'un Noël à un autre, les liftings n'ont pas tout effacé...